samedi 30 juin 2018

Ces documentaires que Télérama oublie souvent de critiquer.

O tempora, o mores ! (Cicéron : Catilinaires)

Qui aime bien, châtie bien. (adage traduit du latin)

Je souhaite déboulonner toutes ces statues officielles iconiques, comme j'aime à éreinter ces médias officiels ayant pignon sur rue, lorsqu'ils expriment ce que je réprouve et véhiculent des idées reçues médiocres. (le Polémiste Inconnu du XXIe siècle).

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Un sur trois... Ainsi pourrais-je résumer la manière dont Télérama, ce magazine culturel et télé tracassier, a traité l'ensemble du triptyque documentaire qu'Arte consacra fin avril-début mai 2018 à Karl Marx. Trois documentaires ou docu-fictions ! C'est inespéré et merveilleux lorsque l'on sait que Claude Debussy dut se contenter d'Arte concerts en ligne et de trois minutes dans un documentaires sur les impressionnistes et le japonisme ! Pour Charles Gounod, dont le bicentenaire de la naissance eût dû occuper nos a-médias (ah, combien ce préfixe privatif est justifié depuis 1986 !), ce fut bien pis : Arte concerts seule, et basta ! Si Karl Marx avait été français, Arte n'aurait rien fait sur lui... 
Adonc, la chaîne autrefois de référence des alternatives au PAF putréfié issu du 16-mars 1986, proposa un trio documentaire bienvenu commémorant le bicentenaire de la naissance du philosophe-économiste, né à Trèves le 5 mai 1818. Il s'agissait de : 
- Karl Marx penseur révolutionnaire, docu-fiction de Christian Twente (diffusion le 28 avril 2018 à 20h50) ;
- De Marx aux marxistes, documentaire de Peter Dörfler (diffusion le 28 avril 2018 à 22h20) ; 
- Le phénomène Karl Marx,  documentaire de Torsten Striegnitz et Simone Dobmeier (diffusion le 2 mai 2018 à 22h20).
Remarque n° 1 : aucun de ces documentaires n'était français, ce qui ne fait que renforcer le fossé entre la partie française d'Arte et sa partie allemande, la partie française ayant de plus en plus tendance à restreindre la place du passé antérieur (non XXe-XXIe siècles) dans ses programmes, place désormais réduite à quelques figures consensuelles culturo-basiques comme Rodin, Delacroix ou les impressionnistes.
Remarque numéro 2 : seul le premier de ces documentaires eut droit à la première partie de soirée, ce qui confirme que Marx est un sujet trop ardu, non générateur d'audience, en une chaîne désormais aussi contaminée par l'audimat que les autres. 
Remarque numéro 3 : ce même documentaire-fiction, avec l'excellent Mario Adorf
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  dans le rôle du père du marxisme, fut le seul du triptyque "marxien" d'Arte à avoir droit à un article critique (et bon) dans Télérama.
Remarque numéro 4 : des signes de résistance culturelle à la médiocrité se multiplient sur le net, en particulier sur des plates-formes vidéos que je ne nommerai pas, que les inquisiteurs de la chasse à l'illégalité "auteuriste" ne parviennent plus à réprimer, interdire, parce qu'intimement, ces mêmes inquisiteurs savent à quel niveau mainstream chébran la culture générale est en train de tomber. Conscients de cette médiocrité culturelle dans laquelle nous sombrons, ces "résistants" d'un nouveau genre essaient, comme Cassiodore au VIe siècle, de sauver, préserver ce qui peut encore l'être : ils et elles mettent massivement en ligne gratuitement, au grand dam de nos juristes spécialisés dans la propriété intellectuelle, toutes les archives culturelles (en particulier philosophiques et littéraires) de l'Ina et de France culture. Ces cyber Cassiodore
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 ne sont pas pour moi des hors-la-loi, loin s'en faut. Ils et elles ne font qu'exprimer un ras-le-bol culturel vis à vis des médias institués abandonnés à la chébrantude. Je les applaudis avec chaleur.
J'ajouterai une remarque supplémentaire : en visionnant, par exemple, les vidéos de la défunte émission Un siècle d'écrivains, je réalise d'une part qu'en 2018, un projet similaire serait impossible à entreprendre, y compris sur Arte, et d'autre part, que la perte de Bernard Rapp, qui dirigea cette collection éminente, représente une catastrophe culturelle irrémédiable. Il est singulier de constater la coïncidence, la concomitance, entre le décès de Bernard Rapp, survenu le 17 août 2006 et le virage pop d'Arte avec les summer of... 
Pour en revenir au traitement critique partiel (et partial ?) des documentaires par  Télérama (que je continue de lire, tant le reste de la presse tourne au torchon facho ou people) et refermer cette parenthèse digressive, multiplions les exemples. 
Si vous achetez chaque mercredi cet hebdo culturel-télé, et que vous vous attardez aux articles consacrés aux programmes, vous constaterez, par exemple, que Télérama oublie presque systématiquement de consacrer la moindre ligne aux documentaires scientifiques ou archéologiques que France 5 diffuse le mardi soir. Mépris ? Manque de temps des rédacteurs-trices journalistes qui vont au plus pressé et à ce qu'ils ou elles jugent plus familier ? 
Les choses deviennent plus graves avec le documentaire qu'Arte a consacré à l'expo du Musée d'Orsay sur les pays baltes, pour le centenaire de leur indépendance. Quoiqu'il fût remarquable, notre hebdo s'en ficha comme d'une guigne. Diffusé mi avril, ce film, d'une haute qualité, s'intitulait Les Âmes baltes, et rendait compte avec brio de cette exposition en cours au Musée d'Orsay, véritable découverte dépaysante faisant pour une fois réellement avancer notre connaissance en Histoire de l'Art. Quand on veut l'excellence, on le peut.
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Télérama, hélas, tend à récidiver parfois dans son silence sur d'autres docus d'art non contemporain. Fait tout autant impensable, alors qu'il s'agit d'un de nos peintres fétiches les plus populaires, Télérama n'a pas pipé mot du documentaire de la Galerie France 5 Le dernier Monet, les nymphéas et l'Amérique, diffusé le dimanche 22 avril 2018, en lien avec l'exposition du Musée de l'Orangerie Nymphéas. L’abstraction américaine et le dernier Monet.
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 Incroyable mais vrai ! Je pourrais aisément multiplier les exemples hebdomadaires, et je finirais par me perdre en cours de route. Tous ces constats multipliés indéfiniment illustrent le déclin culturel continu - pas ici celui de la télévision, mais celui de nos journalistes de presse qui ne sont plus capables de remarquer l'émission importante au profit des infinis copiés-collés critiques consacrés parfois à la trentième ou quarantième diffusion en moins d'un demi-siècle d'un même film pseudo-classique du cinéma . Pire que l'éternel retour ou le temps cyclique des Mayas !
Télérama cautionne ainsi les absences criantes d'émissions sur Octave Mirbeau (pour en revenir à un sujet non pas éculé, mais typique de notre état culturel), Claude Debussy, Lili Boulanger
 https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/d/da/Lili_Boulanger_1.jpg/220px-Lili_Boulanger_1.jpg
 ou Charles Gounod ou encore sur les révolutions de 1848. Non seulement, la rédaction de cet hebdo qui baigne dans la post-culture issue des destructions iconoclastes des zélotes ultras de Pierre Bourdieu (qui n'a jamais écrit qu'il fallait cesser de transmettre la culture antérieure) trouve tout à fait normale la non initiative du service public et d'Arte dans ces domaines-là, mais elle ne se pose même pas la question de la gravité devenue ordinaire de tels faits. A moins que Télérama applique les écrits de George Steiner à la lettre : pourquoi parler encore d'une culture "classique" qui fut impuissante à prévenir la Shoah ?
Je passe le cas particulier de Stéphane Bern et de ses Secrets d'Histoire, souvent vilipendés, quelquefois tolérés (c'est le cas du prochain Blanche de Castille).

Prochainement : Alan Bridges, cinéaste maudit ?

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