dimanche 31 mars 2013

Cloud Atlas : le sabotage avéré d'un grand film (et autres miscellanées d'indignations cinématographiques).



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Car je considérais désormais les films de Dom Pedro comme de l'ordure, mais de l'ordure précieuse, bien qu'elle schlinguât vachement (Cyber Louis Ferdinand Céline : Critique acerbe de la Réflexion impure).

Je ne verrai sans doute jamais Cloud Atlas dans une salle. Au mieux, je devrai me le farcir d'ici quatre à six mois en simple DVD ou blu-ray, privé du légitime écran de cinéma qui eût reflété toute la splendeur esthétique de cette oeuvre, ce long métrage qui, selon moi, était le plus attendu de l'année 2013 après le prochain Star Trek. Au pire, je serai condamné à le commander en VO non sous-titrée chez l'ogre Amazon parce qu'on refusera de le sortir en DVD français, pour cause de non-succès (voulu par les distributeurs) et de non-rentabilité. C'est cette aventure désastreuse qui est en cours pour le Madame Solario de René Féret dont la non-sortie en petite galette se confirme chaque semaine davantage, alors que des légions de longs métrages sous-estimés et mal exposés en un nombre scandaleusement réduit de copies, tous sortis après l'opus de Féret, se bousculent au portillon failli et putréfié de notre anti-industrie cinématographique. Je vous reparlerai un jour, sur ce blog, de ces films dont aucun éditeur vidéo ne veut en DVD. 

Cloud Atlas, je le sais pertinemment, est un film majeur dont il faut accepter les imperfections, les éléments déroutants, car lui-même adapté d'un des romans les plus complexes et géniaux de ces vingt dernières années, Cartographie des nuages, de David Mitchell.
                                                                
La structure de ce formidable roman pluriel n'est pas simple : au mieux, il s'agit d'un empilement gigogne de récits se déroulant à six époques différentes ; ne pas l'appréhender, c'est omettre les prédécesseurs illustres de David Mitchell : Chaucer, bien sûr, avec sa pluralité, et Dan Simmons, dont Hyperion est l'héritier incontestable.
http://www.vjbooks.com/v/vspfiles/assets/images/simmonsdan.jpg
 Dans le livre de Mitchell, comme d'ailleurs dans le film des frère-soeur Lana et Andy Wachowski sans oublier Tom Tykwer, il n'y a en apparence aucun lien entre ces séquences plurielles et ces personnages multiples se mouvant du XIXe siècle à un avenir improbable "néo-barbare". 
En fait, je pense qu'il faut lire le bouquin comme une structure soit en miroir, soit telles les couches formant la Terre elle-même, soit en mandala : commencer par la partie centrale, la graine, le récit le plus futuriste, conté en une langue relâchée, dégradée (pluralité des styles d'écriture, comme chez Dan Simmons), le seul non dédoublé, puisque central, puis partir en une rétroaction, un progressif retour temporel en arrière, d'époque reflétée en double, en époque reflétée en double, pour conclure par les deux épisodes du XIXe siècle.
                                                                                                             
J'ignore si cette option de lecture est la plus ingénieuse : on peut se contenter de la linéarité, mais, à l'ère de la navigation hypertexte, il est normal que la structure des romans, le mode de lecture lui-même, soient marqué par une évolution, une rupture fondamentale avec la chronologie.
Le trio de réalisateurs-trice a opté pour une autre solution, à ce que j'en sais par les analyses du net et de la presse : une intrication accrue des séquences, une sorte d'écheveau buissonnant subquantique entremêlé toujours plus étroitement, comme pour traduire l'état du temps et de la matière avant l'échelle de Planck. C'est génial, c'est formidable, je le répète, mais cela explique aussi le sabotage du film, car les esprits brillants, intellectuels, sont trop peu nombreux pour saisir et comprendre ce surprenant chef-d'oeuvre, alors qu'Inception, avec ses six à sept niveaux superposés, est parvenu à échapper aux obstacles des saboteurs de marché. 
Oui, Cloud Atlas a été la victime d'un subtil sabotage de la part de ses distributeurs, qui ont véhiculé sciemment à son encontre l'image d'un film fumeux new age. 160 copies au mieux pour cet événement, qui n'a bénéficié d'aucune campagne promotionnelle pointue, au contraire de toutes ces daubes qui envahissent nos salles obscures ! Le scandale intellectuel, culturel, que dis-je, est avéré, probant, sans appel ! Cloud Atlas sera pour moi toujours meilleur que le simplet Jappeloup, dont on nous rebat les yeux et les oreilles. A la mort de l'authentique Jappeloup, je me souviens d'avoir été scandalisé : "Comment ! Ils annoncent le décès d'un canasson alors que des types formidables comme Nathan Milstein et Zino Francescatti n'ont pas eu droit à une seule femtoseconde de nécrologie télévisuelle !"
Il y a pis : cette semaine, Albert Camus passe sous les fourches caudines de l'artificiel et chébran Pedro Almodovar : l'adaptation du Premier Homme, roman inachevé d'Albert Camus, a droit à moins de soixante copies contre près de quatre cents pour ce mini film qui n'ajoute absolument rien à la gloire surfaite de Pedro l'extravagant ! Or, je le sais, le résultat à l'écran du film de Gianni Amelio est tout à fait honorable.  Je fais fi des critiques tièdes. James Ensor avait forgé à leur encontre un néologisme génial : criticulet ! D'où leur insignifiance. Un proverbe arabe ne dit-il pas : les chiens aboient, la caravane passe ?

Pedro Almodovar me fait un peu penser à ce poète oublié de la fin du XIXe siècle, Jean Richepin
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 prétendu défenseur des gueux, qui fit de la taule à Sainte-Pélagie et termina comblé d'honneurs et membre de l'Académie française : parce que les honneurs, ça rend inoffensif, voyez-vous ! Pedro Almodovar, c'est une tromperie, une escroquerie intellectuelle, un type neutralisé depuis longtemps avec sa propre bénédiction, vénéneux comme du Canada Dry, toléré par le friedmano-hayekisme ultralibéral parce que sa nocivité est devenue inexistante et inopérante pour l'ultralibéralisme omnipotent et hérésiarque qui prône l'ultra matérialisme, l'ultra hédonisme et l'archi bamboche libérale-libertaire individualiste. La capacité de nuisance de ce personnage est désormais aussi puissante que celle d'une piqûre de moustique sur la peau pachydermique d'un Apatosaure.  L'esbroufe artificieuse, la pitrerie hénaurme et débridée, truculente ou pas, ne fait pas la rébellion. N'est pas Fellini ou Ferreri qui veut. Le pape François et Sarah Polley sont bien plus dangereux pour les sycophantes de Friedrich Hayek que Pedro le bien rangé... qui s'en fout en fait des pauvres comme de sa première couche-culotte. Il n'est qu'un décadent pseudo-provocateur dans la tradition égotiste de Jean Lorrain. Je me refuse à voir un seul de ses films. Faites comme moi, boycottez-le. Ainsi, on l'oubliera comme tous ces habits verts du passé dont aucun nom ne devait mourir selon Cyrano.
Sarah Polley ... 
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une belle et grande (jeune) dame du cinéma mondial,une rebelle authentique, elle, dont les films sont sabordés à la distribution (au profit de Dom Pedro l'artiste officiel du cinéma d'Hayek). Qui s'est soucié de sa présence au jury cannois en 2007 ? Des a-chaînes prétendues culturelles et rangées dans le système comme Arte ignorent son dernier long métrage, Stories we tell sorti dans une totale indifférence télévisuelle (27 copies !).

Et le massacre filmique et inique des salles obscures va se poursuivre dans les prochaines semaines. Il est d'ailleurs continuel.
Mercredi doit sortir en une dérisoire combinaison d'écrans le deuxième film primé au festival de Gerardmer 2013 : Berberian Sound Studio avec le toujours étonnant Toby Jones, à la trogne superbe. Toby Jones incarne un compromis génial entre Piéral, Michel Simon, Edward G. Robinson et John Bull. Il est monstrueux, et j'aime ça !
Repoussé un nombre incalculable de fois, Upside Down, oeuvre fantastique d'amour fou digne de Peter Ibbetson  et de Roméo et Juliette, plastiquement magnifique, avec la coruscante Kirsten Dunst (est-ce ma faute si j'aime de type de femmes ?), est promis à une sortie en catimini le 1er mai.
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Idem sans aucun doute pour Stoker, une oeuvre intrigante propre à m'intéresser, cette fois avec la tout aussi charmante et intemporelle Mia Wasikowska.
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Lecteurs, lectrices de ce blog ! Venez nombreux le lire ! Rebellez-vous contre le conformisme cinématographique favorisant les nanars officiels !

5 commentaires:

  1. Pour l'instant, Berberian Sound Studio est marginalisé à six copies et L'Ecran Fantastique le flingue en règle.

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  2. Par contre, Le Monde a bien compris ce film, ce qui ne le sauve pas, hélas, du naufrage commercial intégral voulu par les distributeurs. 25 entrées à peine (sur une copie unique !) en 1ere séance à Paris hier !

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  3. Plus les infos culturelles d'Arte coulent, meilleur est le magazine de France 5 "Entrée libre" : là, au moins, on parle de Berberian Sound Studio, de l'Ange du bizarre au musée d'Orsay et on annonce les morts !

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  4. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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  5. Les chiffres de l'Ecran fantastique le révèlent : Cloud Atlas a fait 40% de ses entrées sur Paris-périphérie, preuve d'une médiocre distribution ailleurs.

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