samedi 22 avril 2023

Tu quoque Hergé.

 Toi aussi, mon fils.(Jules César à Brutus lors de son assassinat).

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Hergé, créateur de Tintin, nous a quittés il y a quarante ans. Contrairement aux manifestations autour du cinquantenaire de la disparition de Picasso, indénombrables tellement elles sont pléthoriques, il doit hélas se contenter d'une commémoration squelettique ! 

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 Ce silence autour d'Hergé me rappelle fâcheusement la non-commémoration en 2013 du centenaire de Charles Trenet. Les raisons de cette non-commémoration hergéenne pourraient être limpides si elles ne relevaient pas de l'hypothèse et de la conjecture.

Primo, cela signifierait que nous ne pouvons plus dissocier l'oeuvre de l'artiste : en ce cas, l'attitude d'Hergé durant l'occupation nazie de la Belgique, ses fréquentations, la tache de certains contenus graphiques et scénaristiques de L'Etoile mystérieuse ainsi que sa collaboration au Soir volé suffiraient à rendre définitivement Hergé infréquentable, bannissant à jamais Tintin et Milou de l'histoire de la bande dessinée franco-belge. Tout ceci est bien montré dans Hergé fils de Tintin de Benoît Peters, biographie faisant autorité parue en 2002. 

Secundo : les conditions juridiques de l'obtention d'une permission de reproduire et d'exploiter ne serait-ce que d'une seule vignette des aventures de Tintin sont devenues si draconiennes qu'elles rendent impossible toute commémoration sans l'aval des ayants droits, à savoir l'ex société Moulinsart devenue Tintimaginatio en 2022. Même le pastiche ne trouve pas grâce aux yeux de cette entreprise !  Quand on saura que  les Schtroumpfs de Peyo viennent de faire l'objet d'une parodie autorisée, on comprend ce qui ne va pas.

On insinuera que la situation est grave mais pas désespérée, qu'on peut encore rattraper Hergé, qu'il n'est de toute façon "que" belge et que la télé n'a ni les sous ni l'envie pour négocier la production d'un documentaire avec Tintimaginatio. En attendant, la sclérose patrimoniale guette et la momification de Tintin, Milou et de leur univers n'attire pas - c'est une lapalissade - les nouvelles générations, à l'heure où des jeunes ne comprennent même plus le mot "Lagaffe" dans le nom de Gaston. Cette situation pourra-t-elle perdurer ad vitam aeternam, du moins au-delà des soixante-dix ans communs au basculement d'une oeuvre dans le domaine public ?

En 2023, Hergé et Tintin auront été mal lotis, réduits à des non-événements même pas localisables sur un plan et une carte. Est-ce là une conséquence de l'éloignement temporel irréversible de la série ?  Alas, poor Yorick ! 

Prochainement : café littéraire consacré à une introduction à L'Or de Blaise Cendrars.



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