Un tiens vaut mieux que deux, tu l'auras (vieil aphorisme remontant au XVIe siècle et repris par La Fontaine).
Ils étaient cinq, cinq acteurs dont les visages furent connus, à défaut de leur nom, moins familiers à nos oreille que leur tête à nos yeux. Ils nous ont quittés tous les cinq, foudroyés par une pandémie impitoyable, et leur départ est presque passé inaperçu. Ils s'appelaient Maurice Barrier, Jacques Rosny, Philippe Nahon, Claude Evrard et Daniel Cauchy. Baptisons-les "le groupe des cinq", rendons-leur hommage et interrogeons-nous sur les raisons de la presque ignorance qui entoura leur départ définitif pour d'autres cieux.
Maurice Barrier d'abord, car c'était une figure mieux connue que son propre nom... Vous savez, ce type qu'on reconnait à tous les coups dans un film ou un feuilleton sans jamais savoir comment il s'appelle... Maurice Barrier fut pour la télévision Gauguin, Staline, Maupassant, le juge Vassières de Fabien de la Drôme (1983-1984). Il se glissa dans la peau de personnages innombrables chez lesquels sa moustache caractéristique faisait toujours à la fois florès et mouche.Il affronta Henri Virlogeux, un autre monstre sacré du petit écran, en incarnation incisive du futur tsar rouge éliminant Trotski. Son Gauguin était monstrueux, en un feuilleton osé pour la télé de l'époque (1975), personnage tout en truculence et en bougonnerie, génie asocial qui plaquait tout pour la peinture : son métier d'agent de change, sa femme scandinave Mette (qu'il trompait au vu et au su de tous) et finissait rongé par les maladies vénériennes car vérolé par les vahinés, drogué aussi à la morphine pour atténuer la douleur de son pourrissement.
Le souvenir de Maurice Barrier s'estompa peu à peu, au point qu'on l'enterra trop tôt en le confondant avec le chanteur et acteur Ricet Barrier (dont le père s'appelait, ô hasard, Maurice Barrier !) disparu le 20 mai 2011. Pour l'anecdote, Ricet Barrier prêta sa voix à Saturnin, le canard de Jean Tourane.
Les deux hommes n'étaient même pas jumeaux, Maurice Barrier étant certes né en 1932, mais un 8 juin, tandis que Ricet Barrier ne vit le jour que le 25 août suivant... Il est hautement significatif que l'article nécrologique du Monde consacré à Maurice Barrier, n'eut jamais droit à sa version papier.
Passons à Jacques Rosny, encore plus oublié si possible.
Jacques Rosny fut connu comme le loup blanc, dans le sens littéral des termes, puisqu'il interpréta le rôle titre dudit "loup" dans un feuilleton en costumes diffusé en 1977. Il interpréta Louis XIII à deux reprises dans "Richelieu" et "Mazarin" et fut même Henri III dans "Les grandes conjurations." Après vint l'histoire du Napoléon de Serge Lama.
Cette comédie musicale fut quelque peu controversée.Jacques Rosny mit en scène ce spectacle au théâtre Marigny en 1984, alors que Serge Lama allait perdre ses parents dans un tragique accident de voiture. D'ailleurs, Jacques Rosny méritait mieux comme metteur en scène que comme acteur, même s'il ne fut pas absent du cinéma. Sa présence dura jusqu'aux années 1990.
Le temps est venu de passer à une courte évocation de Philippe Nahon, dont seul Libération se préoccupa à son décès.
Philippe Nahon appartint à la classe de ces grandes gueules qui firent le bonheur du cinéma français. Gaspard Noé le rendit célèbre grâce à la paire de films Carne (1991) et Seul contre tous (1998), devenu un film culte. Philippe Nahon incarne à jamais cette trogne, cette figure, de boucher chevalin fasciste qui veut faire justice lui-même... Gaspard Noé rencontra de grandes difficultés pour réaliser Seul contre tous, projet sulfureux dont nul ne voulait. Bien sûr, Philippe Nahon tourna pour la télévision, où ses rôles furent assez nombreux. Par exemple, il participa à différents épisodes des Enquêtes du Commissaire Maigret et des Cinq dernières minutes, sans omettre certains feuilletons costumés médiocres telle La Comtesse de Charny. Passons l'éponge...
Au sujet des deux derniers comédiens faisant l'objet de cet article, je confesse avoir eu moins de familiarité avec eux qu'avec les trois premiers de la liste. Je les ai moins fréquentés sur le petit ou le grand écran, et les connais moins bien. Quid alors de Claude Evrard et de Daniel Cauchy ?
Claude Evrard, d'abord, le moins connu des cinq. Il s'agissait avant tout d'un homme de théâtre, et j'avoue aller peu souvent au théâtre. Claude Evrard fut un excellent pédagogue, un professeur d'art dramatique renommé. Il joua avec son épouse Danielle Ajoret, que je connais mieux.
Cependant, Claude Evrard, au cours de sa longue carrière, ne négligea ni le cinéma, ni la télévision. Il tourna pour Claude Goretta, Gilles Carle, Gérard Mordillat, Georges Lautner, Jean Yanne, Robert Enrico etc. Il fut de Maigret, ds Cinq dernières minutes, de Vidocq et de Marie Besnard, un des derniers rôles d'Alice Sapritch en 1986. Enfin, il fut nommé aux Molières en 1989 pour le Molière du meilleur comédien dans un second rôle dans Un mois à la campagne d'Ivan Tourgueniev.
Achevons ce texte, assez sommaire, par une évocation forcément trop concise et laconique de Daniel Cauchy.
Encore une personnalité attachante, protéiforme, qui eut plus d'une corde à son arc. Cependant, on peut noter que Daniel Cauchy fut bien davantage sollicité par le grand écran que par le petit, ou par les tréteaux du théâtre. Encore un second couteau à la manière de Dominique Zardi, m'objecterez-vous, bien que la carrière de l'impétrant s'étende de l'orée des années 1950 à l'an 2000. Il est amusant, par ailleurs, d'apprendre par la bande (par Wikipedia, en fait), que Daniel Cauchy fut réalisateur...de films publicitaires ! Panzani, Ovomaltine, cela dit peut-être encore quelque chose à des téléspectateurs commençant à se charger d'années.Ne pointez pas sur moi un doigt accusateur et critique, plein de véhémence. Ne m'admonestez pas sous prétexte que je focaliserait mes centres d'intérêt sur les morts, certes talentueux.
Je n'en ai nullement fini avec les cohortes de disparues et disparus... La prochaine fois, vous subirez encore mes accents de colère...
Ils étaient cinq, cinq acteurs dont les visages furent connus, à défaut de leur nom, moins familiers à nos oreille que leur tête à nos yeux. Ils nous ont quittés tous les cinq, foudroyés par une pandémie impitoyable, et leur départ est presque passé inaperçu. Ils s'appelaient Maurice Barrier, Jacques Rosny, Philippe Nahon, Claude Evrard et Daniel Cauchy. Baptisons-les "le groupe des cinq", rendons-leur hommage et interrogeons-nous sur les raisons de la presque ignorance qui entoura leur départ définitif pour d'autres cieux.
Maurice Barrier d'abord, car c'était une figure mieux connue que son propre nom... Vous savez, ce type qu'on reconnait à tous les coups dans un film ou un feuilleton sans jamais savoir comment il s'appelle... Maurice Barrier fut pour la télévision Gauguin, Staline, Maupassant, le juge Vassières de Fabien de la Drôme (1983-1984). Il se glissa dans la peau de personnages innombrables chez lesquels sa moustache caractéristique faisait toujours à la fois florès et mouche.Il affronta Henri Virlogeux, un autre monstre sacré du petit écran, en incarnation incisive du futur tsar rouge éliminant Trotski. Son Gauguin était monstrueux, en un feuilleton osé pour la télé de l'époque (1975), personnage tout en truculence et en bougonnerie, génie asocial qui plaquait tout pour la peinture : son métier d'agent de change, sa femme scandinave Mette (qu'il trompait au vu et au su de tous) et finissait rongé par les maladies vénériennes car vérolé par les vahinés, drogué aussi à la morphine pour atténuer la douleur de son pourrissement.
Le souvenir de Maurice Barrier s'estompa peu à peu, au point qu'on l'enterra trop tôt en le confondant avec le chanteur et acteur Ricet Barrier (dont le père s'appelait, ô hasard, Maurice Barrier !) disparu le 20 mai 2011. Pour l'anecdote, Ricet Barrier prêta sa voix à Saturnin, le canard de Jean Tourane.
Les deux hommes n'étaient même pas jumeaux, Maurice Barrier étant certes né en 1932, mais un 8 juin, tandis que Ricet Barrier ne vit le jour que le 25 août suivant... Il est hautement significatif que l'article nécrologique du Monde consacré à Maurice Barrier, n'eut jamais droit à sa version papier.
Passons à Jacques Rosny, encore plus oublié si possible.
Jacques Rosny fut connu comme le loup blanc, dans le sens littéral des termes, puisqu'il interpréta le rôle titre dudit "loup" dans un feuilleton en costumes diffusé en 1977. Il interpréta Louis XIII à deux reprises dans "Richelieu" et "Mazarin" et fut même Henri III dans "Les grandes conjurations." Après vint l'histoire du Napoléon de Serge Lama.
Cette comédie musicale fut quelque peu controversée.Jacques Rosny mit en scène ce spectacle au théâtre Marigny en 1984, alors que Serge Lama allait perdre ses parents dans un tragique accident de voiture. D'ailleurs, Jacques Rosny méritait mieux comme metteur en scène que comme acteur, même s'il ne fut pas absent du cinéma. Sa présence dura jusqu'aux années 1990.
Le temps est venu de passer à une courte évocation de Philippe Nahon, dont seul Libération se préoccupa à son décès.
Philippe Nahon appartint à la classe de ces grandes gueules qui firent le bonheur du cinéma français. Gaspard Noé le rendit célèbre grâce à la paire de films Carne (1991) et Seul contre tous (1998), devenu un film culte. Philippe Nahon incarne à jamais cette trogne, cette figure, de boucher chevalin fasciste qui veut faire justice lui-même... Gaspard Noé rencontra de grandes difficultés pour réaliser Seul contre tous, projet sulfureux dont nul ne voulait. Bien sûr, Philippe Nahon tourna pour la télévision, où ses rôles furent assez nombreux. Par exemple, il participa à différents épisodes des Enquêtes du Commissaire Maigret et des Cinq dernières minutes, sans omettre certains feuilletons costumés médiocres telle La Comtesse de Charny. Passons l'éponge...
Au sujet des deux derniers comédiens faisant l'objet de cet article, je confesse avoir eu moins de familiarité avec eux qu'avec les trois premiers de la liste. Je les ai moins fréquentés sur le petit ou le grand écran, et les connais moins bien. Quid alors de Claude Evrard et de Daniel Cauchy ?
Claude Evrard, d'abord, le moins connu des cinq. Il s'agissait avant tout d'un homme de théâtre, et j'avoue aller peu souvent au théâtre. Claude Evrard fut un excellent pédagogue, un professeur d'art dramatique renommé. Il joua avec son épouse Danielle Ajoret, que je connais mieux.
Cependant, Claude Evrard, au cours de sa longue carrière, ne négligea ni le cinéma, ni la télévision. Il tourna pour Claude Goretta, Gilles Carle, Gérard Mordillat, Georges Lautner, Jean Yanne, Robert Enrico etc. Il fut de Maigret, ds Cinq dernières minutes, de Vidocq et de Marie Besnard, un des derniers rôles d'Alice Sapritch en 1986. Enfin, il fut nommé aux Molières en 1989 pour le Molière du meilleur comédien dans un second rôle dans Un mois à la campagne d'Ivan Tourgueniev.
Achevons ce texte, assez sommaire, par une évocation forcément trop concise et laconique de Daniel Cauchy.
Encore une personnalité attachante, protéiforme, qui eut plus d'une corde à son arc. Cependant, on peut noter que Daniel Cauchy fut bien davantage sollicité par le grand écran que par le petit, ou par les tréteaux du théâtre. Encore un second couteau à la manière de Dominique Zardi, m'objecterez-vous, bien que la carrière de l'impétrant s'étende de l'orée des années 1950 à l'an 2000. Il est amusant, par ailleurs, d'apprendre par la bande (par Wikipedia, en fait), que Daniel Cauchy fut réalisateur...de films publicitaires ! Panzani, Ovomaltine, cela dit peut-être encore quelque chose à des téléspectateurs commençant à se charger d'années.Ne pointez pas sur moi un doigt accusateur et critique, plein de véhémence. Ne m'admonestez pas sous prétexte que je focaliserait mes centres d'intérêt sur les morts, certes talentueux.
Je n'en ai nullement fini avec les cohortes de disparues et disparus... La prochaine fois, vous subirez encore mes accents de colère...
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