Je n'ai pas pour habitude d'aborder dans cette série d'articles des auteurs disparus tout récemment. Je vais déroger à la règle que je me suis fixée en abordant le cas de Claude Seignolle,
décédé le 13 juillet dernier à l'âge vénérable de 101 ans. J'ai été scandalisé par la non-couverture médiatique de cette mort, surtout par Le Monde qui a jugé inutile de consacrer le moindre mot nécrologique à cet écrivain somme toute important en son domaine : le genre littéraire fantastique régional ou de terroir. Or, Claude Seignolle, auteur de contes et de nouvelles, a signé au moins un chef-d'oeuvre : La Malvenue. Il fut de plus un pilier de la mythique collection fantastique Marabout des années 1970, dont je possède la majeure partie des volumes parus à force d'écumer les bouquinistes depuis un quart de siècle.
Y a-t-il eu un procès d'intention contre Claude Seignolle, l'excluant par avance de tout hommage médiatique, comme le fut avant lui un autre auteur "localiste" flirtant avec l'insolite, Jean Anglade (1915-2017), mort lui aussi plus que centenaire ? Si Jean Anglade
fut avant tout le chantre d'une certaine Auvergne, Claude Seignolle élargit son propos à diverses régions françaises en tant qu'auteur et folkloriste. Il naquit en Dordogne, à Périgueux, le 25 juin 1917. Il prit la succession d'Arnold van Gennep (1873-1957)
dans ses enquêtes ethnographiques. Il nous lègue d'innombrables contes bien troussés, composés dans une langue à la fois colorée et accessible. Je confesse n'avoir que tardivement découvert cet auteur remarquable, vers mes trente ans, au cours de ma quête de Marabout anciens. Les Contes sorciers constituèrent la première de mes lectures.
Je me mis conséquemment à dévorer l'oeuvre de Seignolle, en même temps que celle d'un autre grand oublié de la littérature fantastique : le belge Thomas Owen (1910-2002), abondamment repris par Marabout.
On ne compta plus chez cet éditeur ce panorama de nouvelles et de romans, ces Histoires vénéneuses, Histoires maléfiques, Récits cruels et autres Contes macabres, sans omettre bien sûr La Malvenue. Tentons d'évoquer brièvement ce dernier titre... Il parut pour la première fois en 1952. Il a constamment été réédité, assez récemment la dernière fois (2014) aux éditions de poche Libretto, filiale de Phébus.
L'intrigue de La Malvenue se déroule en Sologne, une Sologne rétro, ancienne, assez XIXe siècle, du temps où existait encore la nuit réelle, profonde, avant que l'urbanisme galopant ne pollue la planète de ses éclairages impressionnants. A côté de la nuit existe la sorcellerie, bien connue de Claude Seignolle, en qui Lawrence Durrell
voyait le plus grand écrivain fantastique du XXe siècle.En ce cas, pourquoi l'ignora-t-on presque complètement à sa mort ? En frontispice de certains de ses livres (les recueils de contes singuliers, notamment), Claude Seignolle apparaissait portraituré par un dessin le représentant comme un conteur du bizarre, en symbiose avec la nature, sorte de berger primitif voire d'homme-loup chamanique post-paléolithique.
Il y eut aussi Les Loups verts, publié en 1970,
davantage un recueil de trois nouvelles d'épouvante qu'un essai, contrairement à ce qu'affirme l'article de Wikipedia, recueil fondé sur le vécu personnel de l'auteur sur fond de seconde guerre mondiale et d'atrocités nazies. L'illustration de couverture de Marabout était explicite, les SS étant assimilés à des loups-garous. N'oublions pas non plus Les évangiles du Diable qui s'inscrivent dans l'illustre lignée de Frédéric Soulié (Les Mémoires du Diable)
et d'Ambrose Bierce (Le Dictionnaire du Diable).
Enfin, outre le conteur fantastique, nous ne pouvons négliger le compilateur, l'assembleur et l'enquêteur ethnographe héritier de Van Gennep et contributeur d'anthologies dignes de la collection Merveilleux des éditions José Corti (qui croisent le géographique et le thématique). Il y eut dans les années 1990 des recueils classés par régions, édités par Omnibus et France Loisirs (Contes, récits et légendes des pays de France). Son éditeur de prédilection fut Maisonneuve & Larose. Ainsi, j'acquis en 2001 une nouvelle édition des Promenades à travers les traditions populaires languedociennes des Cévennes à la mer.
Quittons-nous là en espérant que justice sera rendue à Claude Seignolle et que son nom pourra survivre.
Prochainement : ces festivals estivaux 2018 qu'Arte n'a pas couverts.
dans ses enquêtes ethnographiques. Il nous lègue d'innombrables contes bien troussés, composés dans une langue à la fois colorée et accessible. Je confesse n'avoir que tardivement découvert cet auteur remarquable, vers mes trente ans, au cours de ma quête de Marabout anciens. Les Contes sorciers constituèrent la première de mes lectures.
Je me mis conséquemment à dévorer l'oeuvre de Seignolle, en même temps que celle d'un autre grand oublié de la littérature fantastique : le belge Thomas Owen (1910-2002), abondamment repris par Marabout.
On ne compta plus chez cet éditeur ce panorama de nouvelles et de romans, ces Histoires vénéneuses, Histoires maléfiques, Récits cruels et autres Contes macabres, sans omettre bien sûr La Malvenue. Tentons d'évoquer brièvement ce dernier titre... Il parut pour la première fois en 1952. Il a constamment été réédité, assez récemment la dernière fois (2014) aux éditions de poche Libretto, filiale de Phébus.
L'intrigue de La Malvenue se déroule en Sologne, une Sologne rétro, ancienne, assez XIXe siècle, du temps où existait encore la nuit réelle, profonde, avant que l'urbanisme galopant ne pollue la planète de ses éclairages impressionnants. A côté de la nuit existe la sorcellerie, bien connue de Claude Seignolle, en qui Lawrence Durrell
voyait le plus grand écrivain fantastique du XXe siècle.En ce cas, pourquoi l'ignora-t-on presque complètement à sa mort ? En frontispice de certains de ses livres (les recueils de contes singuliers, notamment), Claude Seignolle apparaissait portraituré par un dessin le représentant comme un conteur du bizarre, en symbiose avec la nature, sorte de berger primitif voire d'homme-loup chamanique post-paléolithique.
Il y eut aussi Les Loups verts, publié en 1970,
davantage un recueil de trois nouvelles d'épouvante qu'un essai, contrairement à ce qu'affirme l'article de Wikipedia, recueil fondé sur le vécu personnel de l'auteur sur fond de seconde guerre mondiale et d'atrocités nazies. L'illustration de couverture de Marabout était explicite, les SS étant assimilés à des loups-garous. N'oublions pas non plus Les évangiles du Diable qui s'inscrivent dans l'illustre lignée de Frédéric Soulié (Les Mémoires du Diable)
et d'Ambrose Bierce (Le Dictionnaire du Diable).
Enfin, outre le conteur fantastique, nous ne pouvons négliger le compilateur, l'assembleur et l'enquêteur ethnographe héritier de Van Gennep et contributeur d'anthologies dignes de la collection Merveilleux des éditions José Corti (qui croisent le géographique et le thématique). Il y eut dans les années 1990 des recueils classés par régions, édités par Omnibus et France Loisirs (Contes, récits et légendes des pays de France). Son éditeur de prédilection fut Maisonneuve & Larose. Ainsi, j'acquis en 2001 une nouvelle édition des Promenades à travers les traditions populaires languedociennes des Cévennes à la mer.
Quittons-nous là en espérant que justice sera rendue à Claude Seignolle et que son nom pourra survivre.
Prochainement : ces festivals estivaux 2018 qu'Arte n'a pas couverts.
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