vendredi 21 septembre 2012

Le nouveau Musée d'Orsay et ses tableaux manquants.

"Toutes les choses de la Culture étoient tombées à un niveau si bas que plus personne ne se souvenoit du temps où elles étoient encore hautes." (Mémoires du nouveau cyber Saint-Simon).

Ceci n'est pas une polémique gratuite mais un constat, indépendant de l'affaire révélée ces jours-ci par Le Canard enchaîné.
Visiteurs qui avez fort bien connu l'ancien musée d'Orsay, si vous vous êtes comme moi rendu l'été dernier au Nouvel Orsay, vous avez pu y constater, nonobstant l'accrochage d'alléchantes nouveautés et autres acquisitions récentes, l'absence cruelle de tableaux majeurs (je ne parlerai pas des sculptures que je connais moins bien) :
- Luxe, Calme et Volupté d'Henri Matisse,
http://farm2.static.flickr.com/1295/1389419667_4598d63f53.jpg
 Henri Fantin-Latour : Un Coin de table,
http://www.culture.gouv.fr/Wave/image/joconde/0540/m506004_94de61416_p.jpg
Henri Fantin-Latour : La Famille Dubourg,

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/c/ce/The_Dubourg_Family_by_Fantin-Latour.jpg/200px-The_Dubourg_Family_by_Fantin-Latour.jpg
                                                                                       
Henri Gervex : Portrait de Mlle Valtesse de La Bigne,
 http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/9/9e/Henri_Gervex_Portrait_Mlle_Valtesse_de_la_Bigne.jpg/220px-Henri_Gervex_Portrait_Mlle_Valtesse_de_la_Bigne.jpg
                                                                               
Auguste Renoir : La Danse à la Ville,
http://claude-monet.org/artbase/Renoir/1841-1919/apc825800/apc.jpg                                                                                                                                                                        
Auguste Renoir : La Danse à la Campagne,

 http://fr.muzeo.com/sites/default/files/styles/image_basse_def/public/oeuvres/peinture/moderne/danse_ea_la_campagne93998.jpg?itok=7UT8DYMk                                                               

Henri Fantin-Latour : Autour du piano,
http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/8/8a/Fantin-Latour_Autour_du_piano.jpg/280px-Fantin-Latour_Autour_du_piano.jpg

Alfred Stevens : le Bain,


http://cache2.allpostersimages.com/p/MED/61/6159/3EWG100Z/affiches/alfred-stevens-le-bain.jpg                                                                                                                             
Maurice Denis : Jeu de volant,

http://www.oceansbridge.com/paintings/artists/2012/may2/big/Maurice-Denis-xx-Jeu-de-volant-xx-Musee-d%27Orsay.jpg                                                                                                                                                                          
Maurice Denis : Portrait d'Yvonne Lerolle en trois aspects,

 https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/6/65/Portrait_d_Yvonne_Lerolle_en_trois_aspects-Maurice_Denis-IMG_8185.JPG

Giovanni Boldini : portrait du comte Robert de Montesquiou,

http://www.galerie-creation.com/giovanni-boldini-portrait-of-robert-de-montesquiou-n-6270300-0.jpg

Claude Monet : Madame Louis Joachim Gaudibert,

http://imgc.allpostersimages.com/images/P-473-488-90/13/1350/UJZS000Z/posters/claude-monet-portrait-of-madame-louis-joachim-gaudibert-1868.jpg                                                                                                                                                                
Etc. Ceci pour les manques les plus flagrants constatés de visu, la préparation de l'exposition Les impressionnistes et la mode et les prêts consentis au Quai d'Orsay (non encore survenus à ce moment) n'expliquant pas toutes ces absences. Je sais bien qu'un musée, ça aime effectuer un roulement des accrochages, mais là, tout de même !  Henri Fantin-Latour apparaît comme une des victimes majeures des nouveaux accrochages de ce Nouvel Orsay, puisque désormais dispersé aux quatre vents du vaste lieu, alors que, dans l'ancienne muséographie, il avait droit à son emplacement réservé dans le parcours évolutif pictural, comme si ce peintre, embarrassant, inclassable car ni impressionniste, ni académique, était devenu impossible à situer dans l'histoire de la peinture du XIXe siècle, d'où l'actuelle dispersion malheureuse des tableaux encore exposés de ce maître !
A la suite de cette dommageable énumération non exhaustive, une impression douloureuse m'habite : le Musée d'Orsay, que j'ai tant aimé voilà un quart de siècle, merveilleux lieu de culture insigne auquel j'ai rendu hommage dans mon incompris et jamais assez lu et commenté "Translateur pictural",  ne serait-il plus qu'un blockbuster ultra-commercial gonflé aux anabolisants ultralibéraux et populistes qui aurait relégué au rencart des réserves infernales une foultitude de toiles et d'autres oeuvres importantes sous prétexte de ce sacro-saint roulement nécessaire muséographique ?
Et cette pratique, pourtant courante, témoignerait-elle de révisions historiographiques fâcheuses, déchirantes et embêtantes à l'encontre notamment de Fantin-Latour, qui ferait ainsi les frais d'un semi ostracisme, d'une demi damnatio memoriae, depuis que le grand  Hector Obalk (dont Arte, de plus en plus chébrantudienne et présentiste a supprimé la géniale et trop rare émission Grand'art) le qualifia de peintre académique, mettant Fantin dans le même sac douteux que les atroces et boursouflés Jean-Léon Gérôme et Alexandre Cabanel ?                                       

Comme nous avons pu le constater aujourd'hui même 25 septembre 2012 sur Internet, mon intuition concernant l'absence de certaines toiles à cause de la préparation de l'expo sur les impressionnistes et la mode était juste, du moins concernant les deux danses de Renoir et le Madame Gaudibert de Monet, mais, ce qui me trouble, c'est que, parmi les tableaux montrés à cette occasion, j'avais tout de même pu en admirer  quelques uns, non encore enlevés, dans les collections générales cet été ! De plus, il n'y a pas que des impressionnistes dans cet événement culturel bien parisien  : j'ai bel et bien reconnu du James Tissot et du Jean Béraud dans les vidéos du net... peut-être aussi du De Nittis (il faudra vérifier) et même la Dame au gant, célébrissime portrait mondain de 1869 de Carolus-Duran (présent aussi l'été dernier...).  Mais où est passée cette chère Valtesse de la Bigne dans tout ça, cette rousse fantastique qu'eût pu interpréter la jeune comédienne Lola Naymark ?

Quant à Fantin (tiens, il y a son portrait de Manet à l'expo...), pour illustrer le petit dédain ou dénigrement implicite dont il fait semble-t-il parfois l'objet en tout son oeuvre peint (ses natures mortes de fleurs jugées répétitives surtout), je prendrai la métaphore du paravent de soie derrière lequel se dissimuleraient des critiques empreintes faussement de mutisme, n'osant exprimer en face, sans masque, qu'elles méjugent désormais ce peintre ni impressionniste, ni de l'Institut, pourtant encore en vogue dans les années 80 (la rétrospective superbe du Grand Palais de 1982, dont je me rappelle encore le reportage, en témoigne), tandis, qu'en parallèle, elles adulent et réhabilitent le clinquant et exécrable Jean-Léon Gérôme, sorte de Jeff Koons ou de Damien Hirst bancable et ultra-commercial de son temps, qui n'eut raison  en matière d'art que sur un point unique : oui, Monsieur Gérôme, les statues grecques étaient bien polychromes. Qu'en aurait pensé Charlotte Dubourg dans mon court roman "Etoffe nazca" ?

1 commentaire:

  1. A propos de l'Impressionnisme et la mode, Le Monde de ce 2 octobre vient de critiquer l'aspect de mise en scène commerciale de cet expo destinée à rapporter des sous en cette période de disette culturelle budgétaire : si nos médias de masse, télévisuels surtout, et cette chère Arte en particulier, s'occupaient davantage de couvrir les expositions d'art patrimonial plus pointues qu'Orsay propose aussi et qui, quant à elles, font avancer la recherche en Histoire de l'art, tandis que tous ceux qui seraient compétents journalistiquement parlant pour en rendre compte s'en fichent comme de colin-tampon, alors, notre musée illustre dépendrait moins d'expédients mercantiles destinés à drainer les touristes ne connaissant rien d'autre que le B-A-BA impressionniste, puisque ceux qui pourraient causer des autres expressions plastiques du XIXe siècle (l'art britannique victorien en particulier), ne le font jamais. Heureusement que les éditions Faton et le site Internet La Tribune de l'Art sont là pour sauver l'honneur savant et continuent contre vents et marées à s'accrocher à une conception noble du métier de conservateur de musée

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