A Delphine Desyeux, une des dernières petites filles à l'ancienne, qui maintenant a l'âge de Richard Millet...
Le silence est un parti pris. (aphorisme de moa)
Jean Rostand, Henri Gouhier, Pierre Auger, Jean Piveteau... les grands hommes, c'était eux. (réflexions d'un cyber pamphlétaire)
Jean Rostand, Henri Gouhier, Pierre Auger, Jean Piveteau... les grands hommes, c'était eux. (réflexions d'un cyber pamphlétaire)
C'est pas bon de souhaiter la mort de quelqu'un, même si on déteste ce quelqu'un... Admettons que ce même quelqu'un ne soit qu'un des pneus de la bagnole du voisin qui vous emmerde. Hé bien, dans ce cas, plus de scrupules à avoir : qu'il crève ! (le cyber Louis-Ferdinand Céline)
Les rats s'empressent de quitter le navire lorsqu'il coule... surtout ceux au coeur entouré de graisse... problème de flottabilité ? (nouvelles réflexions d'un cyber pamphlétaire)
Si notre Obélix national était mort en 1991, j'aurais pleuré. Désormais, j'applaudirai et sablerai le champagne à l'annonce de son trépas. (ultimes réflexions d'un cyber pamphlétaire)
L'ordinateur-cerveau a le pouvoir d'emmagasiner des informations beaucoup plus que tout autre cerveau animal. La croissance retardée ne l'amène à l'âge adulte qu'entre 15 et 20 ans, ce qui lui permet d'amasser une énorme quantité de connaissances jusqu'à cet âge et bien au-delà. Ce phénomène étrange a fait de l'Homme un maître du monde, doué de conscience et capable d'agir sur son destin. Il est corrélatif de la constatation regrettable qu'il dut faire lors des premières phases glaciaires (et peut-être réitérer lorsqu'il quitta l'Eden) et s'aperçut qu'il était nu. Cette nudité vient également d'un retard de croissance jamais rattrapé, l'absence de fourrure étant celle de tout foetus de Singe à sa naissance.
(Henri et Geneviève Termier : Les Animaux préhistoriques, PUF, collection Que sais-je 1977)
Livide, sorti dans l'indifférence absolue en décembre 2011, fut une des innombrables victimes cinématographiques de la déferlante Intouchables qui inscrivit à son tableau de chasse désastreux des dizaines d'oeuvres parfois médiocres, fréquemment estimables, dont le nombre d'entrées fut alors négligeable et immérité.
Livide représente un de ces longs métrages passés inaperçus. Appartenant à un cinéma de genre méprisé par notre bien-pensance cartésienne, on se gaussa de lui, soulignant (lorsqu'article critique il y avait !) ses défauts plutôt que ses qualités. Ses 17 copies le condamnaient d'avance.
A cause d'Intouchables, et parce que je suis un cinéphile honnête, éthique, qui ne pirate pas, je n'ai pu goûter à cette friandise du cinéma fantastique à la française, qu'en DVD tout récemment, alors qu'il eût mieux valu que je le visse en salle, comme toute oeuvre cinéphilique (même mineure) qui se respecte. A ce jour, Lettre d'une inconnue, le cultissime film de Max Ophuls avec l'ambiguë (sexuellement parlant du fait que sa silhouette de sylphide lui permettait de jouer à la perfection les nymphettes de 13-14 ans) et magnifique Joan Fontaine, est le seul long métrage dont je puis me vanter l'avoir vu sur tous les supports possibles : salle de projection classique, VHS, DVD, You Tube...
Livide donc, pur produit, certes, d'un cinéma commercial de genre (distribué, je l'ai dit d'ailleurs, en une poignée dérisoire de copies le destinant à quitter l'affiche avec promptitude), mais qui recèle perles et trésors cachés à qui sait le regarder avec attention, à qui comme moi possède les références artistiques indispensables.
Malgré des concessions convenues aux films fantastiques ou d'horreur à l'américaine (Julien Maury et Alexandre Bustillo, les réalisateurs, avouent leurs sources d'inspiration et leur dette envers ces films et cinéastes-là, David Cronenberg notamment, mais aussi envers Dario Argento), Livide atteint, en certaines de ses séquences, des niveaux indéniables de beauté plastique et de poésie, de surréalisme et d'onirisme esthétique.
Oui, j'ai aimé Livide, même si des éléments de l'oeuvre ne m'ont pas convaincu (la bande de jeunes voulant organiser un cambriolage dans la mystérieuse maison de la vieille comateuse, la ressemblance trop accusée entre la jeune comédienne Chloé Couilloud et Béatrice Dalle, qui joue les apparitions fantomatiques furtives et vaporeuses, presque subliminales, de sa mère morte, l'ambiance nocturne d'Halloween, le jeu un peu forcé de Félix Moati et Jérémy Kapone rappelant celui des partenaires de Christa Théret dans Le Village des Ombres etc.).
Parfois, il y a des incohérences et des invraisemblances ; on a du mal à relier certaines séquences (Catherine Jacob enlevant une adolescente à vélo, que l'on retrouve saignée à mort dans une baignoire plus tard, ce qui fait accroire que c'est elle le vampire qui agit pour son compte alors qu'elle est la complice, la commensale de Marie-Claude Pietragalla qui incarne Deborah Jessel, la prof de danse spectrale et plus ou moins zombie), mais à d'autres moments, on est transporté et on jubile.
A ces moments-là, justement, Livide rejoint le Georges Franju des Yeux sans visage et le Cocteau d'Orphée.
Livide est donc français, profondément français dans son traitement de la matière fantastique, malgré les obligations commerciales imposées par la loi du gore sanglant.
C'est la petite Anna, la fille de Deborah Jessel, interprétée par la jeune et étonnante Chloé Marcq, qui emporte mon adhésion. Les scènes de retour en arrière, sorte d'évocation un peu sadique des cours de danse, avec une connotation saphique ténue et feutrée, ce souvenir de petits rats à la Delphine Desyeux sur fond de musique de Chopin, frôlent le sublime, surtout lorsque la nature exacte d'Anna nous est progressivement dévoilée.
Nous l'avons déjà vue, automate momifié, empoussiéré, trésor caché de Deborah Jessel, esquisser quelques gestes mécaniques, à demi brisée par l'affolement stupide des partenaires deChloé Couilloud. Anna me rappelle la collection des poupées de cire artificiellement vieillies de Cléore de Cresseville dans Le Trottin et la poupée des Valois de Monsieur de Phocas de Jean Lorrain.
L'idée d'une sorte de Coppélia vampire, mi-humaine, mi-androïde, est originale, bien qu'elle eût mérité qu'on la développât encore davantage et avec plus de soins. Tout le film aurait dû être axé sur cela.
Par instants, l'atmosphère de Livide, avec sa demeure mystérieuse, baroque, hors d'âge, sa poupée danseuse Anna à la figure craquelée, écaillée et tavelée comme un tableau ancien, n'est pas sans rappeler le mythique Collectionneur de cerveaux de Michel Subiela (1976) avec André Reybaz (sublime interprète du Golem de Jean Kerchbron en 1967), la regrettée Claude Jade et François Dunoyer, adapté de la nouvelle Robots pensants, de George Langelaan. J'ai aussi songé à une aventure méconnue des héros de bédé Tif et Tondu, Magdalena, de Will et Desberg (1986), qui se déroule dans une Venise parallèle peuplée d'automates. Il y a aussi du Alice, avec ces animaux robots empaillés attablés et costumés pour le thé... mais on pense aussi aux masques d'oiseaux de Franju dans Judex.
L'action de Livide se déroule judicieusement en Bretagne, terre de légendes, terre de la Mort et de l'Ankou, bien que cet élément folklorique ne soit pas creusé, au profit d'Halloween.
Livide, quand ses auteurs le veulent, est donc capable d'atteindre des sommets de poésie troublante. Anna vole, ressent les brûlures du soleil, a faim d'écarlate, arbore une bouche pourprée, affiche les souillures de sa panoplie de danseuse, de nymphe goule, lamie ou empuse, lorsqu'elle a goûté à une juvénile proie tuyautée dans son tutu romantique à la Edgar Degas. Le vampire volant, c'est du surréalisme, mais aussi de l'Anne Rice,
qui nous apprend qu'ils savent voler. Lucie Clavel (le personnage qu'interprète Chloé Couilloud) libère Anna du joug, délivre l'automate, désopercule ses yeux cousus, clos.
qui nous apprend qu'ils savent voler. Lucie Clavel (le personnage qu'interprète Chloé Couilloud) libère Anna du joug, délivre l'automate, désopercule ses yeux cousus, clos.
La séquence de l'envol final d'Anna, ressuscitée, perdant ses craquelures telle une mue épidermique revivifiante, comme une renaissance de tout son être, est une pure splendeur.
Ce film aurait plu à Daphné et Phoebé de Tourreil de Valpinçon, les jumelles vampiriques, personnages remarquables du sulfureux roman d'Aurore-Marie de Saint-Aubain : Le Trottin.