Ceci est une icône de l'art. Ceci a été peint par un artiste que, jusqu'à présent je pensais en théorie iconique. Je dis bien, en théorie, parce qu'il s'avère qu'en ce premier trimestre 2024, ce n'est plus le cas. En dehors du musée parisien de la Vie romantique, nul ne semble se soucier de la commémoration du bicentenaire de sa mort, survenue le 26 janvier 1824.
Au passage, je confesse avoir omis dans mon précédent article une icône défraîchie de la chanson - ses afficionados vont hurler ! - Tino Rossi, dont on eût dû commémorer en 2023 les quarante ans de la disparition.
Cependant, la réduction de notre peintre romantique à un musée parisien de moindre importance que les autres, avec en outre, le greffon d'une polémique autour de l'authenticité des oeuvres exposées fait réfléchir : ce que propose le Musée de la Vie Romantique est-il intégralement de Géricault (puisque je le nomme enfin) ? Un article récent du Monde est entré dans la danse. Ecrit par Roxana Azimi, paru le 7 juin 2024, il s'intitule "Querelle d'experts autour de l'exposition Géricault au Musée de la vie romantique". Ce serait peu grave si Géricault avait eu droit, à côté de cela, d'autres célébrations, notamment audiovisuelles. Hélas, l'expo ainsi questionnée demeure le seul événement de 2024 autour du premier grand peintre romantique français !
A côté, parlons du cas plus qu'étrange de la comtesse de Ségur, morte il y a 150 ans le 9 février 1874.
Même Madelen, la bien connue plateforme de l'Ina, n'a pas réagi, ce qui est surprenant, lorsqu'on connaît le nombre appréciable d'adaptations de la comtesse de Ségur qu'elle propose aux abonnés, notamment celles du Théâtre de la Jeunesse de Claude Santelli.
Résumons-nous : Géricault et la comtesse de Ségur étaient en théorie tout à fait à la portée des chaînes de télévision, en l'occurrence France Télévisions et Arte, mais ces deux chaînes et groupes s'en sont intégralement désintéressés ! Pour Arte, seuls comptaient, patrimonialement - du côté français - l'impressionnisme et le surréalisme, tandis que la partie allemande de la chaîne n'oubliait ni Smetana,
ni Bruckner,
ni Kant,
ni Kafka, ni même Sibelius, même si c'était chaque fois dans le cadre d'émissions pour noctambules. La France serait-elle devenue rétive à toute forme de culture non mainstream, non chébran et non contemporaine ?
Pendant ce temps, France 5 ne s'est jamais relevée de la disparition d'Un soir au musée puis de la Galerie France 5, qui, sous la houlette de Laurence Piquet, assurait la couverture indispensable des arts non contemporains sur le service public. Si Laurence Piquet avait encore été aux commandes d'une émission du même type, nul doute que Géricault eût eu droit à un documentaire de 52 minutes !
Au sujet de la comtesse de Ségur, je ne comprends toujours pas la raison pour laquelle France Télévisions n'a même pas songé à faire appel à Stéphane Bern qui, dans un Secret d'Histoire consacré à l'autrice des géniaux Malheurs de Sophie, n'aurait pas démérité !
Reste le cas épineux de Jules Michelet,
l'historien républicain emblématique du XIXe siècle, décédé (est-ce un hasard ?) le même jour que Sophie Rospotchine, le 9 février 1874, tout de même présent dans les volumes 1 et 9 de la remarquable Histoire dessinée de la France ! Sans compter la belle réédition en poche de l'intégralité de son Histoire de France il y a quelques années. Michelet serait-il devenu trop lyrique, trop vieillot, en un mot, illisible, comme désormais 99% de la littérature antérieure au XXIe siècle ? Encore un cent-cinquantenaire boudé ! Quand je pense que certains se plaignent en ce moment de l'ignorance des 200 ans de la disparition du philosophe Maine de Biran, parti le 20 juillet 1824 !
Celles et ceux qui ont détecté la paille Maine de Biran n'ont rien trouvé à redire à la triple poutre Géricault - Ségur - Michelet...
Prochainement : offrons-nous une belle dose de polar déjanté avec Mamie Luger de Benoît Philippon, dans le cadre du Café littéraire...
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