samedi 5 août 2023

Ces peintres dont on ne veut plus 10 : Maurice Utrillo.

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Voilà un peintre singulier, qui figura autrefois parmi les figures majeures de la peinture française du XXe siècle et désormais déclassé, bien moins renommé que sa mère Suzanne Valadon ! Utrillo, c'est incontestable, a quitté le sérail après y avoir siégé en bonne place. Par exemple, l'actrice anglo-américaine Joan Fontaine possédait des oeuvres d'Utrillo ! 

https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/d/d1/Joan_Fontaine_in_1943.jpg 

Passons le problème de l'artiste maudit alcoolique notoire. Je ne résiste pas à l'envie de vous raconter une petite anecdote éclairant la dévaluation de Maurice Utrillo en histoire de l'art moderne. Adolescent, je possédais une encyclopédie - déjà dépassée lors de son achat puisqu'elle mentionnait que Stan Laurel vivait encore, sachant qu'il mourut en 1965 - 

Description de cette image, également commentée ci-après 

qui consacrait des hors textes couleurs aux personnages qui officiellement, étaient classés comme importants lors de sa publication. Maurice Utrillo était du lot.

Quelques années plus tard, je suivis en auditeur libre des cours d'histoire de l'art moderne : Maurice Utrillo n'y fut même pas cité ! 

Suzanne Valadon réhabilitée et honorée, difficile de se faire désormais une idée juste d'un fils traité dans l'ombre de sa mère dans les documentaires à elle consacrés. 

Maurice Utrillo naquit Valadon, de père inconnu, à Paris, au n° 8 rue du Poteau à Montmartre, le 26 décembre 1883. Il est mentionné dans Wikipedia comme étant un des rares peintres montmartrois à y être né. Il n'a reçu son nom patronymique qu'à l'âge de 8 ans lorsqu'un des amants de sa mère, le peintre catalan Miquel Utrillo (1862-1934) le reconnut. 

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Atelier de Suzanne Valadon et de Maurice Utrillo, musée de Montmartre, Paris.    

Maurice Utrillo a passé son enfance auprès de sa grand-mère à Pierrefitte-sur-Seine. Une adolescence tourmentée débuta. Les séjours à l'asile, l'alcoolisme, ne furent pas chez lui que des lieux communs. Au-delà des crises de démence éthylique, son génie artistique se révéla. Sa mère l'encouragea, mais c'est la rencontre avec le peintre Alphonse Quizet (1885-1955) qui sera décisive : dès lors, à partir de 1910, Maurice Utrillo s'engagera résolument dans une production régulière, qui lui permettra de vivre de son oeuvre, acquérant la notoriété à compter de 1920. Nous le savons, les médias préfèrent les peintres maudits et miséreux aux peintres arrivés. Être propriétaire du château de Saint-Bernard dans l'Ain, être décoré de la Légion d'honneur en 1929, autant d'éléments qui officialisent Utrillo ! Encore heureux qu'il ne fût pas devenu membre de l'Académie des Beaux-Arts ! Ce couronnement de carrière eût été impossible à cette époque compte tenu des goûts attardés de cette institution. 

De même, le fait qu'il convola tardivement - à 51 ans, en 1935 - en justes noces avec Lucie Valore (1878 - 1965), au talent de graveuse aquafortiste et lithographe certain rend notre sieur suspect d'avoir mené jusque-là une vie de bamboche, de boxons, d'avoir couru la prétentaine en patachon et bâton de chaise qui se respecte ! Foin là du mauvais procès intenté à Maurice Utrillo ! 

Ne permit-il pas à la peintre Georgette Dupouy (1901-1992), de recevoir la reconnaissance artistique et publique ? Ne fut-il pas le mentor du jeune Charles Féloa ? Décidément, cet homme ne pouvait être foncièrement méchant... 

Hélas, le seul musée qui lui était consacré ainsi qu'à sa mère, a fermé ! Il s'agissait du musée Utrillo-Valadon, situé à Sannois dans le Val-d'Oise. Ouvert en 1995, fermé dès 2014, victime d'un sort funeste (il était souhaité qu'il s'ouvrît à l'art contemporain), il connut des problèmes de structures et des bisbilles ! 











Certains objecteront : on peut toujours admirer Utrillo au musée de Montmartre ! Son atelier y est reconstitué.  












J'ai pu admirer cette représentation de la rue Lepic en 2011 au musée des beaux-arts de Nancy. 











Un dernier petit tour au musée de l'Orangerie, visité en 2006, avec la Mairie au drapeau. Le reste à l'avenant, afin qu'on redécouvre enfin Utrillo et qu'on lui consacre un documentaire amplement mérité. 

Il nous a quittés à Dax, le 5 novembre 1955.

Prochainement : l'été 2023 sur Arte : "summer of rediffusions" ? 

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